MEMOIRE D'UN CLUB LEGENDAIRE  RED STAR 93

" LE RED STAR, mémoire d'un club légendaire"
(Les bonnes feuilles, 9ème partie)

L'AILE DROITE ASTON - SIMONYI

Fred Aston   André Simonyi
Fred Aston sous le maillot vert, André Simonyi au stade Bauer en mars 2000

"Et cependant du Red Star 1938, aussi bigarré que les autres, par miracle émerge un couple, l'aile droite Aston - Simonyi.
André Simonyi est venu au Red Star presque par hasard. Un jour Lucien Gamblin s'en va à Roubaix acquérir un joueur anglais, mais l'affaire n'est pas conclue. Gamblin rentre bredouille. Il traverse une place de Lille. Qu'y voit-il ? Simonyi assis à la terrasse d'un café.
- Je te croyais à Sochaux ?
André lui explique qu'il a été roulé. A Sochaux, il est barré par le Suisse Abegglen et par Roger Courtois. Ils en assez de jouer en équipe seconde et il est là pour renouer avec son ancien club, l'Olympique Lillois.
- Ne fais pas ça ! s'écrie Gamblin. C'est jamais bon les replâtrages. Viens plutôt à Saint-Ouen !
Une heure de discussion, un coup de téléphone à Sochaux et Gamblin, le champion du baratin, revient au Red Star, non pas avec un Anglais, mais avec un ancien international hongrois ayant joué à l'Attila de Budapest, André Simonyi.
Saint-Ouen ne perd pas au change. La technique de Simonyi est d'une pureté étonnante, sa frappe de balle tient du prodige et il va s'entendre à merveille avec son ailier, Fred Aston.
Fred Aston, son compère, né d'un père anglais et d'une mère française dans ce milieu très britannique qu'est le monde des courses, a été apprenti jockey à Chantilly. De ce métier oł les gosses sont traités sans tendresse, il a gardé une vivacité qui déconcerte les arrières adverses tout en étant dur au mal et aux chocs. Ses dribles, ses feintes, ses crochets imprévisibles l'ont fait surnommer "Feu Follet", ou encore "Bilboquet", et, comme ses centres sont de surcroît tirés au cordeau, on l'estime le meilleur ailier d'Europe. Son duo avec Simonyi fait accéder le Red Star aux quarts de finale. Là, une fois de plus, la barrière qui a pour nom ce coup-ci Le Havre AC se ferme. Le score fatal : 1-0.
Quelques semaines plus tard, débute en France la 3ème Coupe du Monde, un bien triste monde. L'Autriche a dû déclarer forfait. Et pour cause ! Elle a disparu de la carte, engloutie par l'Allemagne d'Hitler. L'Espagne n'est pas là non plus. Profitant de la plus cruelle des guerres civiles, les nazis et les fascistes l'ont envahie. Ils s'y font la main en attendant de meilleures occasions et massacrent les enfants de Guernica.
L'Allemagne qui a eu l'audace d'inclure dans son équipe les Autrichiens les plus prestigieux et qu'on a laissé faire, est battue par la petite Suisse, mais l'arrogante Italie de Mussolini triomphe de nous. Ces matamores gagneront pour la deuxième fois la Coupe.
En septembre 1938, les accords de Munich sonnent le glas des dernières illusions. Désormais, les Français le savent : ils n'échapperont pas à la guerre. Ils ne s'en montrent pas abattus et continuent à vivre comme par le passé.
Imperturbables, les dirigeants du Red Star Olympique poursuivent leurs expériences. Ils laissent Aston s'en aller au Racing Club de Paris, un Aston qui, le 26 octobre 1938, aura l'honneur d'être l'ailier droit du Continent lors de son match à Highbury contre l'Angleterre.
Autre initiative malheureuse : le Red Star renonce à retenir Larbi ben Barek, le jeune Marocain de Casablanca qu'il convoite. En matière de consolation, on embauche Fruleux, le buteur d'Arras, le goal Desfossé, le Sud-américain Tarrio, Gyarmati, Gnaoui, Scopelli, Ithurbide.
Et cela donne une victoire dans le championnat de seconde division grâce aux 29 buts de Fruleux et aux 26 buts de Simonyi. En Coupe, l'aventure s'arrête en seizième de finale contre Mulhouse qui gagne après prolongation par 2 buts à 1.
Nous voilà à la veille de la guerre. Le moment est venu de faire les comptes. Pendant dix ans, il faut l'avouer le Red Star n'a pas renoué avec sa légende. Son public en a-t-il été déçu ? En aucune façon ! Les fidèles ont continué à venir chaque dimanche, qu'il vente ou qu'il pleuve, à ce Stade de Paris, pourtant lui-même dépassé par des stades beaucoup plus modernes comme Colombes ou le Parc des Princes agrandis à l'occasion de la Coupe du Monde.
Mais ne venons-nous pas de livrer le secret du Red Star ? Cette constances de ses fanatiques, même dans l'adversité, qui fera toujours de lui un club en France sans rival."

Red Star 1938-39

Red Star 1938-1939, Champion de France de Division 2 avec l'effectif suivant :
Gardiens : Defosse, Hatz
Défenseurs : Lorentz, Schwartz, Chantrel
Milieux : Gnaoui, Meuris, Tarrio
Attaquants : Fruleux, Gyarmati, Iliano, Ithurbide, Moulet, Simonyi, Scopelli, Meneut
Remplaçants : Le Leannec, Sanz, Boussard, Szabo, Aubert, Baudot
Entraîneurs : Stabile puis Chantrel

(à suivre )

LE RED STAR,
mémoire d'un club légendaire
de Guillaume Hanoteau, avec la collaboration de Gilles Cutulic
© Robert Laffont - Editions Seghers
Dépôt légal : 1983

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