COUPE DE FRANCE 1973  RED STAR 93

COUPE DE FRANCE 1973 : RED STAR - NÎMES à Saint-Ouen

Par Gérard Valck

Red Star et Nîmes se sont déjà affrontés en coupe, en Coupe de France en 1973, en quart de finale.
A cette époque, les rencontres se jouaient en match aller-retour. A l'aller, les Audoniens s'étaient inclinés sur le vieux stade Jean Bouin,sur le score de 2-4 Le stade de Nîmes, un stade particulier, très chaud, une vraie arène de corrida, les spectateurs étaient sur les joueurs, les adversaires des Nîmois s'en souviennent.
Avant de laisser la "parole" à François Thébaud, créateur de Miroir du Football, (le meilleur spécialiste français du football Brésilien et en particulier de Pelé, le journal "l'Equipe Magazine" a fait dernièrement appel au talent de François Thébaut, pour rendre hommage au footballeur du siècle),observateur impartial du match retour : Red Star - Nîmes en 1973. Nous tenions à rendre hommage à trois joueurs non cités volontairement dans les grands joueurs Nîmois. Nous voulions que leurs noms ne soient pas perdus dans la liste des joueurs qui ont marqué le football du Nîmes Olympique.
Il s'agit de Jean-Pierre Adams. Comme vous le savez sans doute, Jean-Pierre est toujours vivant, mais sa vie est une vie végétative depuis de très longues années. Suite à une opération bénigne au genou, Jean-Pierre Adams est demeuré dans un coma profond. Sa femme et ses enfants continuent de faire preuve d'un grand courage dans une épreuve aussi douloureuse. Jean-Pierre Adams avait débuté en région parisienne à Fontainebleau (un autre grand joueur a également usé ses premiers crampons dans cette ville : Liliam Thuram).
Né à Dakar en 1948, son premier contrat professionnel, il l'accomplit à Nîmes (22 sélections dont 8 sous le maillot nîmois), avant de rejoindre Nice et de terminer sa carrière fin des années 70 au Paris SG. Pendant de longues saisons, il forma avec Marius Trésor, la charnière centrale du onze tricolore.
Le second est Laurent Blanc que chacun connait (sélectioné à deux reprises en Equipe de France, lors de son époque nîmoise (93) et le troisième un personnage connu à Saint-Ouen : Pierre Bernard, gardien tricolore lors de son séjour à Nîmes, avant d'achever quelques années plus tard sa carrière au Red Star.

Miroir du Football (avril 1973), article de François Thébaud

NÎMES, onze défenseurs...

Après le coup de sifflet final qui consacrait la qualification de Nîmes on procédé à l'échange des maillots. pourquoi cette formalité banale fit-elle surgir dans notre esprit l'image toujours stupéfiante de deux boxeurs aux visages tuméfiés par les coups et s'embrassant chaleureusement après l'ultime coup de poing ? Sans doute parce que cette seconde manche du duel des Nîmois et des Audoniens avait ressemblé beaucoup plus à une rixe oł l'on pouvait dénombrer beaucoup plus de coups défendus que sur un ring qu'à un match de football.
Parmi les spectateurs qui se réjouissaient à la sortie du stade des furieux "échanges" auxquels ils avaient assistés, rares étaient sans doute ceux qui avaient distrait leurs regards des emploignades qui avaient pour objectif la possession du ballon. La force de l'habitude incite à porter son intention sur ce qui se passe aux alentours immédiats de la sphère de cuir.

LOIN DU BALLON.

S'ils avaient eu l'idée d'observer ce qui se passait cinquante mètres loin, ils auraient pu voir par exemples Vergnes et Monin* échanger coups de coude, coups de têtes et coups de pied, en dehors de toute action de jeu. Ils auraient pu voir Mézy s'occuper exclusivement en seconde mi-temps de Besnard, le marquer au centimètre, le poursuivre avec obstination dans tous ses déplacements...
Il est vrai qu'autour du ballon "on y allait" gaiement aussi et qu'à l'exception des deux gardiens, de Garrigues, de Besnard, de Ducuing, D'Ameijenda, de Fleitas, Pirmayer et Boyron, on se livrait une guerre sans merci, sous les cris d'une partie du public vociférant à l'adresse des visiteurs un chapelet d'injures dont les plus anodines étaient "assassins, salopes, fumiers". Les sept points de suture à la jambe de Grabowski au match aller à la suite d'une intervention d'Adams, expliquaient bien sûr partiellement cette hostilité. Le comportement purement défensif et destructif des Nîmois après 25 minutes de jeu n'était évidemment pas de nature à leur valoir la sympathie. Mais les joueurs du Red Star étaient-ils sans reproche. N'avaient-ils sacrifié eux aussi au jeu négatif lors du match aller en alignant un seul avant de pointe (Pintenat) ? Cherchaient-ils à éviter les chocs et les collisions en balançant les longues balles aériennes dans le paquet de joueurs agglutinés devant Landi, ou en fonçant dans le tas comme Simon ?

LE QUART D'HEURE NÎMOIS

Nîmes, pourvu d'une avance de deux buts au coup d'envoi, avait les moyens de jouer au football. L'habile Fleitas, Mézy et Pirmayer le prouvèrent durant le premier quart d'heure de la partie, en dépit d'une ambiance déjà tendue de réglements de compte. Vergnes avait laissé échapper une belle occasion de but sur une longue passe judicieuse de Mézy, juste avant l'erreur de passe de Guillolet qui donna à Fleitas une balle que Pirmayer catapulta dans les filets audoniens d'une magnifique reprise de volée (16ème minute).
Mais après cet exploit, les Nîmois ne pensèrent plus qu'à conserver leur avance, alors qu'à la 25ème minute Pirmayer seul devant Travolti, remplaçant Laudu, avait montré que la défense audonienne était très vulnérable. Et quand Garcia réduisit l'écart en reprenant en retourné une balle repoussée par Landi sur un centre-tir de Guillolet (42ème minute), les assauts désordonnés du Red Star s'étaient transformés en une pression d'autant plus forte que toute l'équipe gardoise, à l'exception de Vergnes campait devant ou dans sa surface de réparation.

SIMON LE KAMIKAZE

Il va sans dire que les innombrables situations confuses créées par les balles aériennes attérissant dans ce paquet de joueurs étaient particulièrement propices aux réglements de compte. Et l'on vit des joueurs réputés pour leur correction manifester une agressivité dont on ne les aurait jamais crus capables. Simon oui Simon ! peut-être un peu gêné d'envoyer ses avants au charbon, coupait toute velleité de contre-attaque nîmoise en plongeant les deux pieds en avant, et lorsqu'il se décidait à passer en première ligne, il le faisait avec la détermination d'un kamikaze, ce qui lui valut d'être assommé au cours d'une ruée dont il avait assumé tous les risques.
Si Vergnes, absolument isolé puisqu'il fut le seul Nîmois en position d'avant après une demi-heure de jeu, ne menaça guère Travolti, il eut sa part de responsabilité dans sa "guerre" avec Monin. On connait le Paraguayen. Il n'avait pas fait de sentiment avec son compatriote Fleitas qu'il balaya à trois reprises. Il n'en fit pas non plus avec son ancien coéquipier. Mais quand on aura dit que Vergnes suivit Monin qu'il montait lors de chaque corner accordé au Red Star, qu'il ne se gêna pas pour le charger irrégulièrement, qu'il le marqua impitoyablement en toutes circonstances et qu'il lui rendit les coups avec usure, on comprendra que dans cette jungle, "jouer le ballon" était une expression dépourvue de sens.

LA FIN DE L'ORAGE

Malgré une domination écrasante, il fallut attendre la 63ème minute pour voir le Red Star prendre l'avantage. Une tentative de une-deux Pintenat-Simon-Pintenat ne fut brisée que dans la surface de réparation par une brutale intervention de Sanlaville et Betton. Besnard transforma en force le pénalty qui s'imposait. Curieusement, ce but qui aurait dû rendre l'espoir aux Audoniens, parut revigorer les Nîmois qui, sur des contres appuyés, eurent trois belles occasions (Fleitas, Adams, Boyron) de consolider un succès chancelant. Après quoi, peut-être parce que de part et d'autre les muscles ne répondaient plus, on s'orienta vers le cessez-le-feu. L'échauffourée se soldait par un nombre respectable de plaies et bosses, et un seul avertissement dont personne ne put savoir s'il s'adressait à Vergnes ou à Monin.

UNE SEULE VICTIME

Le "réalisme" firoudien trouvait dans la qualification la seule récompense à laquelle il aspirait et pour laquelle ses joueurs étaient prêts à subir les pires avanies. Pour Farias, "l'honneur" était sauf et son équipe était tombée "la tête haute", en attendant... le tête-à-tête annuel avec le spectre de la relégation.
Il n'y avait eu ni jambes cassées, ni thorax enfoncés, ni traumatismes crâniens... (par quel miracle ?), M. Mouchotte, l'arbitre avait le droit de s'endormir la conscience tranquille. Il n'y avait eu, après tout, qu'une victime dans cette affaire : le football (1).
François THEBAUD

(1) Domenech, autre "héros" de la coupe déclarait le lendemain à France-Inter : "Vous croyez que le football est un sport, vous ? Pour moi ce n'est pas un sport, je n'ai jamais cassé une jambe, mais tous les coups sont bons. Si je me fais prendre, tans pis pour moi. Le football, c'est la guerre".
Heureusement, 25 ans après Raymond Domenech, entraîneur de l'Equipe de France Espoir est devenu plus responsable... et plus humaniste sur le sport.

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